Une « belle mort » existe-t-elle ? La
légende prétend que Molière a eu droit à une « belle mort » , à
savoir sur scène, dans son costume de comédien du Malade
imaginaire, un 17 février 1673. Evidemment, il n'en est rien :
son trépas fut constaté à son domicile. Jean Rouch est-il mort de
la plus belle des manières ? Un jour de 2004, dans la nuit 18 au 19
février, il fut emporté par un accident de voiture sur une route du
Niger, au nord de Niamey. Mourir sur une piste du Niger avait été
vu comme un signe par un de ses proches, sorte de « retour aux
sources » des premiers contacts entre Rouch et l'Afrique,
continent-élu de son coeur.
Car le Jean Rouch qui découvrit le Niger,
en 1941, en clair dans une France occupée par l'Allemagne nazie,
sortait de trois années de formation à l'Ecole des Ponts et
Chaussées. Venir en Afrique, ou plutôt quitter l'Hexagone, en ce
temps-là, était un acte de rébellion de sa part contre l'occupant
et ses alliés. Il rejoignit le corps des ingénieurs des travaux
publics des colonies avec pour première affectation Niamey, pour y
bâtir les routes de l'empire colonial, enjeu d'une féroce bataille
entre Gaullistes et Vichystes. À quel moment l'ingénieur fut-il
débordé par l'ethnographe ?